Situation politique
critique au Bénin
L’ancien Président de
la République, Boni Yayi a parlé !
Publié le 19/04/2019
Par Loth HOUSSOU, La TEMPÊTE
Boni YAYI, le prédécesseur du Président Patrice TALON
Alors que la campagne électorale pour le compte des législatives
du 28 avril 2019 bat son plein dans les villes et campagnes, des voix s’élèvent
à succession pour barrer la voix à « l’imposture » orchestrée par le
pouvoir en place. Après une énième sortie de l’ex-Chef d’Etat Soglo, suivie de
la réaction du plus vieux parti actif, le Parti du Renouveau Démocratique le mardi 16 avril dernier, l’ex Chef d’Etat,
Boni Yayi a donné rendez-vous à la presse nationale et internationale dans son
domicile hier jeudi 18 avril 2019.
Objectif, inviter le peuple à faire arrêter
le processus électoral en cours. Pour lui, « … Il ne saurait y avoir
d'élections législatives au pays de GBEHANZIN,
KABA, BIO GUERA sans l'opposition… ».
Voici l’intégralité de sa déclaration.
Béninoises et Béninois,
Mes chers compatriotes,
Après les événements de 2012 et 2013, j’ai pardonné. J’ai
réellement pardonné et mon pardon est définitif et irréversible. Je le jure.
J’ai assumé le pouvoir d’Etat. Je l’ai exécuté et j’en
connais les rouages et les difficultés qui y sont liées. On ne peut pas les
surmonter en s’éloignant de Dieu le Père Céleste, Créateur du ciel et de la
terre.
C’est pour prouver à toutes et à tous que mon pardon est
sincère et pour donner une chance au président Patrice TALON de gouverner pour
le bien du peuple, qu’au matin du 6 avril 2016, je lui ai offert la Bible, l’un
des plus grands livres saints qui organisent la meilleure gouvernance dans la
société.
J’espérais sincèrement qu’il en ferait un bon usage tout au
long de son mandat.
Le Roi ne saurait s'installer indéfiniment dans les œuvres de
la chair, ni s'offrir indéfiniment des
droits et ignorer indéfiniment ses devoirs à
l'endroit de la cité. La justice
divine est implacable.
Béninoises et Béninois,
Mes chers compatriotes,
Trois années durant, je me suis gardé de me prononcer
solennellement sur la gouvernance du pays, espérant que le sursaut patriotique
l’emporte sur la gestion clanique du pouvoir qui considère certains citoyens
comme des citoyens de seconde zone. Ce silence est l’expression de mon choix de
ne point interférer dans la gestion de mon successeur mais d’observer.
Aujourd'hui, au regard de la gouvernance imposée à notre
peuple, des nuisances de tout genre qu'elle induit et singulièrement la crise
politique que subit actuellement le pays, c'est un devoir patriotique et de
salubrité nationale de rompre la réserve dans laquelle j'avais choisi de me
murer en dépit des provocations et humiliations dont ma famille biologique,
politique et moi-même continuons de faire l'objet.
Cette gouvernance permanente de musellement et de provocation
instaurée depuis trois années, est montée crescendo avec le vote de la loi sur
la Charte des partis politiques et le Code électoral. Nonobstant la désapprobation
par la majorité d'entre vous de ces lois exclusives, et génératrices de
conflits, le pouvoir en place n'a eu cure de vos protestations et a poursuivi
allègrement l'escalade.
Nous voilà aujourd’hui dans une situation inédite dans notre
pays où une bonne frange de la population est privée de son droit de libre
choix, étant entendu que les candidats qu’ils soutiennent sont purement et
simplement exclus de la compétition électorale par le Chef de l’Etat. Cette crise que traverse notre commune patrie,
est une première depuis la fin de notre historique Conférence des Forces Vives
de la Nation de février 1990. Pour la première fois, sous le renouveau
démocratique, sont qualifiés à prendre part aux élections législatives, deux
listes de la même obédience politique et créées par le Chef de l’Etat.
Cette situation
inédite dans l'histoire politique de notre pays et même en Afrique, a ému la
communauté internationale qui a successivement dépêché une délégation de la
Commission de la CEDEAO, le Représentant du Secrétaire Général des Nations
Unies et une délégation de l’Organisation Internationale de la Francophonie, au
chevet de notre démocratie menacée, sans oublier les émissaires spéciaux de son
Excellence Muhammadu BUHARI, Président de la République Fédérale du Nigéria et
Président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etats et de Gouvernements de
la CEDEAO. J’ai eu l’insigne honneur de rencontrer et d’échanger avec toutes
ces délégations. A ces différentes occasions, je leur ai toujours réaffirmé, l’attachement
du peuple béninois à l’Etat de droit et à sa démocratie, et leur ai réitéré sa
volonté d’aboutir à des élections législatives inclusives, crédibles,
équitables et transparentes.
Je renouvelle mes vœux à
l'endroit de la Communauté internationale de continuer de s'investir
dans la résolution de cette crise. Je resterai reconnaissant des efforts en
cours de son Excellence Muhammad BUHARI
Président de la République Fédérale du Nigéria et Président en exercice de la
Conférence des Chefs d’Etats et de Gouvernements de la CEDEAO en relation avec les autres Etats Membres, pour une
issue heureuse de cette crise en vue de
la préservation de la stabilité dans la
sous région. J'associe à ce cri
de cœur SOS en particulier l'Union Africaine,
l'Union Européenne, les Nation Unies et toute la Communauté
Internationale.
Mes Chers Compatriotes
Beaucoup d’entre vous se sont prononcés de diverses manières
par rapport à cette crise. Je salue au passage mon aîné, le Président Nicéphore
Dieudonné SOGLO et la Présidente Fondatrice du Parti de la Renaissance du Benin
l'Honorable Rosine VIERA SOGLO qui ne cesse de s'investir en dépit du poids de
l'âge. Je n'oublie pas les efforts fournis par les intellectuels, la société
civile, le clergé, les têtes couronnées, les personnalités politiques, les
sages, les jeunes, les femmes et nos frères et sœurs de la diaspora, dans
la résolution de cette crise politique.
Je ne saurais ignorer non plus le précieux appui de la communauté
internationale.
Béninoises et Béninois
Mes chers compatriotes,
J’ai espéré que tous les gémissements et cri de cœur poussés
dans le pays feraient entendre raison au Président de la République. J’ai cru
que tous les efforts fournis par la communauté internationale allaient
convaincre le Chef de l’Etat du risque encouru en optant pour des élections
législatives sans la participation de tous les partis politiques qui le
désirent et qui au demeurant ont accompli
les diligences nécessaires. J’ai espéré enfin que la profession de foi
du Président Patrice TALON de vouloir faire participer tous les partis
politiques et l’assurance qu’il a donnée aux différentes délégations ayant
séjourné dans notre pays dans le cadre de ces élections, étaient sincères.
Hélas ! Il n’en a pas été ainsi.
Contre toute attente et au mépris de ses professions de foi
répétées face aux délégations étrangères et aux Béninois, le Président de la
République s’est inscrit dans la poursuite de ce processus électoral qui exclut
tous les partis politiques de l’opposition et qui n’autorise uniquement que son
seul parti Politique divisé en deux pour
la circonstance , à savoir l'Union Progressiste et le Bloc Républicain.
Béninoises et Béninois,
Mes chers compatriotes,
On gouverne pour le peuple. Toutes les difficultés
rencontrées tout au long de ce processus devraient pouvoir dissuader le
Président de la République de continuer sur sa lancée et sa propre logique
préméditée. Tout Parlement qui découlerait de ces élections, ne peut aboutir
qu’à une instabilité institutionnelle dans notre pays. Les intimidations, les
arrestations, les menaces d’arrestation, les emprisonnements, les interdictions
arbitraires de réunions ou de manifestations des opposants, le déploiement dans
nos villes et campagnes des chars d’assaut, les mandats d’arrêt non justifiés,
la contrainte des opposants à la clandestinité, ou à l’exil, ne sont pas des
solutions à la situation qui prévaut dans notre cher pays, le Bénin.
En tant qu’ainé, ancien Président de la République et citoyen
de ce pays, il me plait de dire au Président Patrice TALON qu’il n’est pas dans
la bonne direction. J’en suis profondément convaincu. S’entêter, c’est tourner
dos aux idéaux de la Conférence des Forces Vives de la Nations. C’est détruire
notre héritage démocratique, c’est décrédibiliser et isoler notre pays au plan
international, c’est remettre en cause la légitimité, la paix et la stabilité
dans notre pays. C’est inaugurer un cycle de violences inutiles, c’est enfin,
mettre en péril la sécurité et la stabilité dans la sous-région. Plaise à Dieu,
Le Père Céleste, de nous préserver du pire.
En conséquence, j’en appelle au sens élevé de l’Etat et de
responsabilité du Président de la République, Monsieur Patrice TALON. Je
l’invite à prendre toute la mesure de la gravité de la présente situation qui
ne nous honore guère, et à arrêter le processus électoral en cours. Qu’il puise
la bonne formule dans le riche arsenal juridique à sa disposition, pour juguler
la crise. Ce faisant, il aura contribué au renforcement de la démocratie, à la
préservation de la paix et à éviter des lendemains douloureux à notre peuple.
Toutes réformes et ajustements sont nécessaires et j'en
conviens pour tenir compte des mutations qui affectent notre pays, la sous
région et le monde. Leurs réussites passent par une gestion participative et
leur capacité à profiter à tout le monde et non à un clan. L'autorité de l'état Chargée de la
mise en œuvre de ces réformes pour être audible passe par l'exemplarité au
sommet de l'Etat.
La Bonne gouvernance participative et permanente ne peut
qu’impulser la transformation politique, économique, sociale et structurelle de
toute société.
Mes Chers Compatriotes
J’en appelle également au professionnalisme des forces de
défense et de sécurité, dans toutes leurs composantes, qui ont fait le serment
de défendre à tout prix la démocratie et l’Etat de droit, de mettre fin aux
exactions, aux persécutions, aux arrestations arbitraires, intimidations et
menaces sur les populations. Ces dernières ne défendent que leur droit
constitutionnel. Ne nous trompons donc pas de cible. Je formule les mêmes souhaits
à l'endroit de notre justice et sollicite son
impartialité.
Béninois et Béninoises
Au cas où le Président Patrice TALON s’obstinerait à conduire
le pays dans le monolithisme politique, toute chose contraire à notre
Constitution du 11 décembre 1990, j’invite tous les Béninois de tous bords, les
institutions de la République, les acteurs politiques, les magistrats, les
acteurs des médias et de la presse, les syndicalistes, les agents de sécurité
et de défense, les femmes de nos villes et campagnes, les jeunes, les
confessions religieuses, les enseignants et autres travailleurs de tous les
secteurs, les artisans, les commerçants, les ouvriers, les producteurs
agricoles, la société civile etc., à user du pouvoir que nous donne notre loi
fondamentale, pour faire arrêter le processus électoral périlleux en cours,
afin de rechercher et de trouver sans délai les solutions idoines pour
organiser des élections législatives inclusives, crédibles, équitables et
transparentes. En effet la légitimité excède toujours la légalité. Il ne
saurait y avoir d'élections législatives au pays de GBEHANZIN, KABA, BIO GUERA sans l'opposition.
Ensemble dans la cohésion nationale et
dans un sursaut patriotique, gagnons le pari d'un parlement inclusif pour
garantir la Stabilité, la Paix et
l'avenir radieux de notre Patrie commune, le Benin.
Vive le Bénin !
Vive la démocratie béninoise !
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